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Bienvenue sur mon blog professionnel !

Celui-ci est dédié à ce que j'appelle l'Art et la Science du Leadership. La Science du Leadership, ce sont les travaux de recherche menés depuis près d'un siècle sur les leaders et le leadership. C'est le Leadership saisi par la raison logique et la méthode scientifique. L'Art du Leadership, c'est la perception et la pratique du leadership au quotidien, celles de ceux qui agissent en leader ou s'engagent à leurs côtés. C'est le leadership saisi par la raison sensible, l'expérience et l'émotion. L'un ne va pas sans l'autre, chacun nourrit notre réflexion et notre pratique du leadership. Vous trouverez ici mes projets, productions, collaborations, réflexions et recommandations sur l'art et la science du Leadership et les équipes dirigeantes.

mardi 5 juin 2012

Mon prochain livre sur le leadership et la direction d'entreprise

Bonne nouvelle, mon projet d'ouvrage consacré au leadership et à la direction d'entreprise vient d'être retenu par les éditions Pearson. Sortie prévue au printemps 2013 si tout va bien, dans la collection Management en Action.

Intitulé "Du Leadership pour Diriger" et sous-titré "l'Art et la Science du Leadership stratégique", cet ouvrage s'adresse à la fois aux enseignants et étudiants en management mais également aux dirigeants et à ceux qui les accompagnent dans leur développement.

Il propose un état de la recherche récente sur le leadership stratégique et plus précisément sur 3 notions clefs que sont le pouvoir, la légitimité et le leadership des dirigeants d'entreprises. J'y présente également mon approche personnelle du développement du leadership du dirigeant basée sur mes travaux de recherche et mes échanges avec plus d'une centaine de dirigeants depuis 10 ans. Comme à mon habitude, j'y développe une approche qui explore et fait dialoguer l'art et la science du leadership, i.e. la pratique et l'expérience des dirigeants eux-mêmes et les études scientifiques sur la direction d'entreprise et le leadership aujourd'hui.

Quand les dirigeants perdent leur pouvoir…ils développent leur influence


J. Westphal,
Professeur de stratégie
 Ross Business School,
Michigan University
Dans cette étude, James Westphal montre que vouloir renforcer le contrôle du dirigeant par le conseil d'Administration, peut susciter, de la part des dirigeants, des stratégies d'influence qui, in fine, contribue à renforcer leur pouvoir mais si celui-ci est "structurellement" réduit.


Réforme de la gouvernance et pouvoir du dirigeant.
Le mouvement de réforme de la gouvernance d’entreprise amorcé dans les années 90 (1) a débouché sur une nouvelle répartition des pouvoirs à la tête des entreprises notamment des grandes entreprises cotées. Le pouvoir, et notamment le pouvoir de contrôle, de l’actionnaire vis-à-vis du dirigeant a été renforcé et réaffirmé dans les textes mais également dans les faits (1). Ainsi, il n’est pas rare aujourd’hui de voir un conseil d’administration remercier un directeur général, ce qui pouvait paraitre impensable il y a 20 ans : Souvenez-vous, en 2002, lorsque Jean-Marie Messier fut poussé à la démission par le conseil d’administration de Vivendi Universal au terme d’un bras de fer de plusieurs mois, ce n’était que la seconde fois qu’un conseil du CAC 40 exerçait ainsi son pouvoir "ultime" de contrôle sur le dirigeant d’une entreprise.

La lutte contre « l’hégémonie managériale » et le renforcement du pouvoir actionnarial sont clairement inscrits dans l’ADN du mouvement de réforme de la gouvernance d’entreprise qui s’appuie sur une vision très particulière de la relation actionnaire-dirigeant : celle véhiculée par la théorie de l’agence (2) qui modélise la relation entre l’agent (le manager) et le principal (l’actionnaire) comme une relation par nature conflictuelle (les fameux conflits d’agence) : leurs intérêts seraient par trop divergents. 
Les «bonnes pratiques de gouvernance » qui vont ainsi être mises en avant par les textes de lois et les codes de gouvernance de ces dernières années vont ainsi s’appliquer à limiter le pouvoir du dirigeant (par exemple en séparant les fonctions de Directeur Général et de Président), renforcer le pouvoir de contrôle du conseil d’administration (par exemepe en renforçant son indépendance) et s’attacher à aligner les intérêts des dirigeants sur ceux des actionnaires (au moyen par exemple de Stock options).

Les chercheurs sont très partagés sur les bénéfices réels (sur la performance de l’entreprise notamment) de ces « bonnes pratiques de gouvernance », mais aussi la validité empirique de la théorie de l’agence ou encore sa vision pessimiste et assez réductrice de l’entreprise et de ses acteurs que celle-ci véhicule (1) (3).

Dans une étude réalisée en 1997/1998 (4) (5) sur un échantillon de 600 grandes entreprises américaines, James Westphal, l’un des chercheurs les plus prolifiques dans le domaine du leadership stratégique (étude des dirigeants d’entreprises) met en lumière la relative improductivité des mécanismes de réduction du pouvoir du dirigeant…au passage il souligne à quel point la prise en compte du leadership du dirigeant  (i.e. sa capacité personnelle d'influence) est au moins aussi importante que celle de son pouvoir formel ou structurel (celui que lui procure notamment sa position et ses fonctions dans l'organisation)

Les réactions des dirigeants face à la perte de pouvoir
L’étude de Westphal rappelle d’abord que la pratique actuelle de la gouvernance des grandes entreprises repose sur deux piliers : premièrement, le renforcement du pouvoir du conseil d’administration à travers notamment le renforcement de son indépendance vis-à-vis de l’équipe dirigeante et deuxièmement, la réduction du pouvoir du dirigeant. Selon Westphal, cette pratique relève d’une approche « structurelle » du pouvoir. Une approche qui met de côté les comportements des acteurs ou les déduit directement de la structure qui les enserre : ainsi, selon les tenants de l’approche structurelle, l’indépendance du CA doit découler de la modification mécanique de sa composition (plus d’administrateurs indépendants i.e. sans lien contractuel avec l’entreprise) et la réduction du pouvoir du dirigeant ( via la séparation des fonctions de Président et directeur Général). Les liens informels, les comportements d’influence sont ainsi mis de côté. Westphal, avec son étude les remet sur le devant de la scène…

Pourquoi un CA indépendant, n’est-il pas puissant ?
Le point de départ de son étude est une question posée par des travaux empiriques antérieurs (Pettigrew, 1992 ; Walsh & Seward, 1990) qui montrent l’absence de lien entre l’indépendance du CA et son pouvoir effectif contrairement à ce que promet le dogme de la gouvernance d'entreprise: comment expliquer la contre-productivité de cette « bonne pratique » ?

Selon Westphal, les dirigeants interprètent l’indépendance du CA comme un signal de renforcement du pouvoir du CA et perte de pouvoir potentiel pour eux: ils vont dès lors s’engager dans des stratégies d’influence interpersonnelles compensant leur perte de pouvoir potentiel vis-à-vis du CA.
Westphal étudie plus spécifiquement deux stratégies d’influence : la persuasion et la flatterie (ingratiation).

La persuasion consiste à emporter l’adhésion du CA par la force de conviction : le dirigeant convainc sur l’intérêt pour le CA de e suivre et de mettre en œuvre la stratégie qu’il propose (Persuasion involves the application of reason or logic to "convince a target that the agent's request or proposal is feasible and consistent with shared objectives). Cette stratégie fonctionne d’autant mieux que le dirigeant possède le talent, l’expertise et le projet nécessaires pour convaincre.

La flatterie consiste à créer chez les membres du CA le sentiment d’une proximité  et d’une appartenance commune qui va désamorcer toute action défavorable à l’endroit du dirigeant (« Ingration encompasses a set of influence tactics which serve to "increase one's attractiveness in the eyes of a more powerful person"). Cette stratégie est particulièrement utile au dirigeant qui ne possède pas d’arguments logiques et factuels et doit miser sur le sentiment et le lien affectif avec les membres du CA.




Westphal a ainsi étudié les stratégies de 221 CEOS américains, qu’il a mesurées à travers des réponses à des questionnaires envoyés aux administrateurs indépendants de près de  600 entreprises ainsi qu’aux CEOs eux-mêmes.

Les comportements de persuasion et de flatterie sont mesurés via des échelles psychologiques, tandis que l’indépendance du CA est mesurée via des indicateurs classiques (nombre d’administrateurs indépendants, séparation des fonctions de DG/président ; proximité des administrateurs (formation, expérience) avec le dirigeant). Westphal mesure également l’évolution de la rémunération du dirigeant (fixe, variable, bonus).

Les résultats montrent que lorsque l’indépendance du CA s’accroit, les comportements de persuasion et de flatterie des dirigeants s’accroissent également. Westphal montre également que l’accroissement de ces comportements d’influence est positivement relié à des modifications de rémunération favorables au dirigeant !

Ce faisant, Westphal suggère que les dirigeants substituent l’influence au pouvoir structurel pour maintenir voire accroitre leur pouvoir sur l’entreprise. Un résultat qui vient nuancer l‘efficacité et la simplicité des mécanismes de contrôle.

Références

(1)              Daily, C.M., Dalton, D.R. and Cannella, A.A. Jr (2003). Corporate governance: decades of dialogue and data, Academy of Management Review, Vol. 28 No. 3, pp. 371-82.
(2)            Jensen, M. &  Meckling, (1976),  Theory of the firm: managerial behavior, agency cost, and ownership structure,  Journal of Financial Economic, 1976, pp. 305-360.
(3)              Ghoshal, Sumantra. (2005). Bad management theories are destroying good management practices. Academy of Management Learning and Education, 4(1), 75-91.
(4)               Westphal, J.D. (1997), For Every Action, a reaction: How CEOs deal with the loss of power in CEO/Board Relationships, Academy of Management Proceedings.
(5)              Westphal, J.D. 1998. Board games: How CEOs adapt to increases in structural board independence from management. Administrative Science Quarterly, 43: 511-537.



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